Prise de brin dans la tourmente nocturne sur le porte-avions Landivisiau - ou les avatars d’un hibou (Printemps 1969)

La Flottille 12F préparait 10 pilotes à la qualification à l’appontage de nuit sur porte-avions. Cela signifiait au moins 250 vols de nuit à effectuer en quelques semaines dont nombre de séances d’appontage simulé sur piste, demandant à la fois du plafond – au moins 1000 pieds – et du vent dans l’axe de la piste. Il se trouve que la base aéronavale de Landivsiau se situe dans le nord Finistère qui n’est pas réputé pour sa météo clémente…



Un appontage simulé sur piste (ASSP)
(c'est pas un crouze et il rate le brin, mais enfin, ça donne une idée...)
(source: ici)



Mike, le Commandant, était absent ce jour-là et son second assurait l’intérim. Nous étions tous deux sur Crouze depuis trois ans. La météo n’était pas bonne en ce soir d’avril, mais bon! Il fallait tenter. La première patrouille partit: deux officiers mariniers chevronnés. A peine décollés, ils annoncèrent qu’à leur avis, vu le vent et la couche à l’ouest du terrain… Mais il fut décidé d’envoyer la deuxième patrouille quand même: moi-même et un autre officier plus jeune d’un an. Ayant décollé sous la pluie et avec un fort vent de travers, nous savions d’entrée que cette soirée allait être mouvementée. Quand aux deux officiers d’appontage (OA) ils avaient déjà donné leur avis (forcément négatif...).

La question qui se posait maintenant était de savoir comment récupérer les avions. Avec son train étroit, ses pneus à haute pression et ses freins de technologie élémentaire adaptés au roulage sur pont d’envol mais pas vraiment au freinage sur piste détrempée à vitesse élevée, le Crouze, conçu pour le porte-avions, tolère mal le vent de travers et la pluie qui rend la piste glissante.

Il fut donc décidé de "prendre" les avions en GCA*, crosse sortie avec prise de brin à l’entrée de la piste. Il fallait pour ce faire respecter un intervalle de cinq minutes entre chaque avion pour assurer le décrochage du brin et sa remise en batterie par l’équipe de trois hommes chargés de sa mise en œuvre. Les OA décidèrent de rester près du "miroir" (système optique permettant au pilote de connaître la bonne pente pour l’approche finale) afin d’observer les avions et éventuellement aider les pilotes. On "ramassa" ** ainsi les deux premiers. Puis je fis percer mon équipier.

J’étais seul en vol lorsque le contrôleur me prévint que "ça devenait de plus en plus sportif ". Ayant stabilisé l’avion à 1500 pieds dans l’axe de la piste, altitude de départ pour l’approche GCA, j’étais secoué en tous sens et pour tenir la route il me fallait adopter une dérive gauche de 20° avec une vitesse de 220 nœuds, dérive qui irait en s’accroissant en finale effectuée à 130 nœuds … Ça promettait d'être du sport.

- "Vert leader de contrôleur final, effectuez vos actions vitales en vue de l’atterrissage. Rappelez effectuées. "

Je sors les aérofreins, la crosse, le train, 220 nœuds la voilure… Mais impossible de déverrouiller la voilure. Je garde donc 220 nœuds, bloque le manche entre les genoux en gardant un œil sur le badin, l’autre sur l’horizon, le troisième sur le cap et un autre encore sur l’altimètre, et à deux mains essaie de déverrouiller la commande de voilure située à gauche. Les secondes passent et l’avion avance vers le point de mise en descente. J’annonce mes ennuis au moment où le contrôleur m’annonce lui "point de début de descente". Je suis à 220 nœuds au lieu de 130… C’est à ce moment que, miracle!, je parviens à mes fins. La voilure se lève ; l’avion bouchonne. J’ai coupé tous les feux pour diminuer les effets du vertige et lorsque l'avion se stabilise enfin à 130 nœuds, il est trop tard pour commencer la descente.

Je repars pour un hippodrome, toujours en configuration tout sorti, dans la tempête, dans les nuages, dans la nuit... mais au chaud, bien assis, confiant dans la mécanique et dans les instruments de bord, en un mot dans l’avion que les éléments agressent. Dans ces cas là, même si j’ai conscience du danger, je reste calme et c’est en pilote "détendu" que quelques longues minutes plus tard j’entamai le GCA.

Crouze en configuration "tout sorti"

Il faut dire aussi, j’avais le l’autre côté un contrôleur de premier ordre. Dans cette sorte de circonstances, les débutants regardent et en prennent de la graine… Mes minima*** en plafond, c’est à dire pour sortir de la couche nuageuse, étaient de 250 pieds. Mais bon, 15 jours plus tôt, le chef OPS ne m’avait-il pas demandé de venir jusqu’à 100 pieds? (à lire ICI...).

-"Vert leader, 5 degrés à gauche, 237 le cap"
Bigre, la piste est au 260, il y a vraiment du vent de travers!

- "Bien en descente, 237, deux à gauche, 235 le cap, tendance à passer haut, 2 à droite, 237… 237 le cap, bien sur le plan de descente".

500 pieds/minute au variomètre, 400 pieds à l’altimètre, 300 pieds, toujours dans la couche, 250 pieds, mes minima et toujours aucune vue de la piste! Vais-je remettre les gaz ? 230 pieds, des lueurs, 220 pieds j’aperçois la piste, le miroir et la rampe d’allumage (que je n’avais jamais eu l’occasion de voir) allumée à puissance maximum, éblouissante… J’annonce "Miroir". La partie est gagnée, le plus dur est fait, quand…je reconnais la voix du Second: "Vert leader, si vous ratez le brin, restez sur la piste." !!?? Que veut-il donc dire? Ou il y a prise de brin, et si je le rate, je remets les gaz, ou il n’y a pas prise de brin, alors je dois rentrer la crosse. Mais oui, c’est cela qu’il a dû vouloir dire. Je prends le manche de la main gauche, saisis la poignée de commande de crosse et la soulève, reprends le manche de la main droite et la manette des gaz de la gauche.

Avec tout cela, affaire de quelques secondes, l’avion a quitté sa trajectoire, ballotté par les rafales. Mais où est le "miroir" au milieu de toutes ces lumières ?… Et puis, le doute tout à coup! Mais non, ce qu’il a voulu dire, c’est que les conditions sont si mauvaises que si je ne prends pas le brin, il vaut encore mieux rester au sol quitte à sortir de la piste que de repartir dans la tourmente… Alors je recommence l’opération, poignée des gaz, manche, crosse, main gauche, main droite. Et l’avion dans tout cela? Il avance comme il peut, comme il pleut… Je me trouve maintenant au dessus de la rampe lumineuse, ébloui.

Je sais qu’il faut "assurer" c’est à dire se poser court et ensuite aller "à la pêche au brin" en soulevant le nez de l’avion mais sans pour autant redécoller. A la dernière seconde il faut aussi axer l’avion sur la piste, bien au milieu, bien au cap, en croisant les commandes, beaucoup de pied à droite, plein manche à gauche car le vent souffle toujours aussi fort de la gauche. Ça y est Posé, l’avion roule, je vais à la pêche, je l’attrape ce maudit brin pourtant salvateur et enfin l’avion s’arrête. On fait reculer l’avion pour dégager le brin du bec de crosse, un mécano s’approche et me fait signe de la rentrer. "Bien joué!" me congratulé-je, in petto. Je roule à nouveau jusqu’à l’aire de stationnement de la 12 F.

Quand je descends de l’avion - damnation! - je le découvre… couvert de boue! Bon, pas grave, je me suis posé court, juste avant la piste. Cela arrive souvent, surtout si le pilote ne suit pas la pente donnée par le miroir. Normalement il y aurait dû avoir, avant la piste, un élément de 100 mètres de surface occasionnellement roulable, bétonnée. Mais la base de Landivisaiu est quasi neuve en 1969 et il a fallu faire des économies lors de la construction. Alors, pas de goudron, pas de béton mais de la terre bien molle sous la pluie… et des cailloux.

Je vais remplir les formules de l’avion quand j’entends un craquement sourd et forcément sinistre. Je ressors et vois "mon" bel avion penché à gauche, jambe de train sectionnée! J’ai compris. Je vais à mon bureau, écris mon compte rendu "à chaud ". C’est un incident aérien. Il y aura commission d’enquête. Un peu trop rigoureux peut-être, je reconnais être sorti à 220 pieds. J’aurais pu dire 300, il n’y a personne pour vérifier sur monoplace mais c’est ainsi. Je l’ai fait donc je l’écris…

Mais alors, quel était le fin mot de l’histoire? Pourquoi cette jambe de train sectionnée? L’enquête permit d’établir qu’en posant l’avion avant la piste, cela avait mis la roulette de nez en position d’extraire de la boue un silex taillé comme un fer de hache, venu frapper la jambe de train gauche, occasionnant une crique à développement rapide. La jambe de train avait finalement cédé sous le poids de la charge lors du plein de carburant. Personne ne m’en voulut, l’ordre donné en finale, chacun s’accordait pour le dire ou le penser, était mal venu. On ne trouble pas le chirurgien au moment critique; c’est pareil pour le pilote. Et puis, quelles conditions météo…

Cependant à l’état-major, d'aucuns furent trop contents de découvrir que "220 pieds" c’était pour le moins "une indiscipline grave" et j’écopais de 20 points négatifs… la honte pour un officier "opérations". Mike rentré à la 12 F me dit: "Tu sais, quand tout va bien, c’est facile d’être bon. C’est dans les coups durs qu’on voit les gens de caractère…".

Merci, Mike. J’ai donc essayé d’avoir du caractère et pris sur moi. Quelques semaines plus tard j’étais qualifié puis confirmé à l’appontage de nuit. J’avais oublié les 20 points négatifs. Mike aussi. Nous avons arrosé au "champ' " le succès de la flottille: 10 pilotes confirmés de nuit. Une première pour l’aviation embarquée de la génération des réacteurs. Et quels réacteurs! Les Crouze…..

Goz Beïda les 1et 2 Juillet 2002

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* GCA Ground Controled Approach ou Approche finale contrôlée du sol ; le pilote exécute les ordres du contrôleur en cap et en taux de descente élaborés avec deux radar de précision

** Ramasser: terme employé sur porte-avions pour désigner le retour à bord des aéronefs (avions ou hélicoptères)

*** Minima: terme par lequel on désigne l’altitude et la distance qu’un pilote doit respecter pour prendre la vue sur la piste d’atterrissage et à partir de laquelle il doit remettre les gaz au cas contraire.

"Bleu leader de Bleu 2, le Sacré Cœur à midi, niveau" (juillet 1974)

La Flottille 12 F est prévue pour participer au défilé aérien du 14 juillet au-dessus des Champs Élysées. Comme pour toutes les unités participantes, il y avait quelques jours avant un vol de répétition pour le "leader" de chaque groupe d'avions et leur "deputy leader", en l’occurrence pour l’ami S, commandant la 12 F, et votre serviteur, officier en second.

En cet après-midi brumeux, nous avions décollé de la base aéronavale de Landivisiau, dans le Finistère nord pour un transit en altitude avant d'atteindre notre premier point de report qui était la base aérienne d'Evreux. Des Mirage décollaient, qui de Cambrais, qui de Creil, qui de Reims, et tout cela devait s’intégrer pour former une longue ligne droite par groupes entre lesquels l'espace se mesurait en secondes. Bien sûr cette intégration par des avions venus de directions différentes se faisait au chronomètre dans un premier temps puis à vue en finale. La route suivie était sensée nous conduire vers l’Arc de Triomphe et la place de la Concorde.

(Source photo: Flottille 16 F)

En ce temps-là, le GPS n’était pas inventé. Sur Crusader, le pilote ne disposait pour naviguer que du cap, de la montre, de la vitesse et de sa sagacité à lire la carte pour contrôler la navigation et éventuellement la corriger. Pilote chevronné, S. disposait de tous ces éléments. Ce n’était malheureusement pas le cas d’un pilote de Mirage angoissé (nous l’appellerons Tartanpion) qui noyait la fréquence commune de ses messages, sans autre intérêt pour les autres que de comprendre qu'il ne maîtrisait pas la situation...


Ce jour là, en région parisienne la visibilité était médiocre et tout le monde très tendu. J’étais en formation serrée à gauche sur le leader. Nous étions déjà axés sur la longue ligne droite et nous attendions d'un instant à l'autre de voir arriver sur notre avant gauche le groupe Mirage qui devait se placer devant nous. Je voyais S tourner la tête sur sa gauche tandis que "Tartanpion leader" "envoyait son nième message disant qu’il avait 15 secondes de retard... Je commençais moi aussi à me sentir nerveux. Je ne pouvais pas regarder sur ma gauche et je résistais tant bien que mal à l’envie de quitter la formation serrée. Au moment où je m’apprêtais à le faire, l’esprit de discipline finit par l'emporter et je restai à poste. Bien m’en prit! Car à cet instant précis, deux Mirages nous croisaient à nous frôler, et, j’en ai la conviction, sans nous voir…

Tout cela avait fini par gêner S, ce qui fait qu’en arrivant à proximité du quartier de la Défense nous étions décalés à droite de la route. Quand, dans la brume, nous distinguâmes l’Arc de Triomphe il nous fallut venir à gauche: au lieu d'arriver en survolant l’avenue de La Grande Armée nous passions par l’avenue Foch… Je connaissais bien Paris, ce qui n’était pas le cas de S. J’espérais, je pensais qu’en survolant l’Arc, il prendrait sur la droite pour embouquer les Champs Élysées. A 500 pieds et 360 nœuds soit à une hauteur de 150 mètres et une vitesse de 180 mètres/seconde, cela va vite… très vite. Voyant que nous continuions tout droit, je l’appelai alors: "Bleu leader de Bleu 2, Sacré Cœur à midi, niveau". C’est à dire que si nous maintenions quelques secondes de plus notre cap, nous allions bientôt entrer dans la basilique… à cheval.


(source: ici)

Bleu leader comprit et obliqua sur la droite. Nous dévalions grand train les Grands Boulevards ; arrivés à République nous primes l'avenue qui conduisait à Nation, puis par la gauche à Vincennes, son bois, son zoo…

Un peu moins d'une heure plus tard, nous étions à Landivisiau avec dans les yeux plein d’images de Paris.

Comme tout le monde avait eu des soucis, il y eut une deuxième répétition, par un après-midi où l’air était limpide. De la Défense à Vincennes, la ligne était droite cette fois et c’est sans stress que nous avons regardé défiler à nos pieds les toits de Paris ; je dois dire que c’était moins drôle... Le 13 juillet, la Flottille au grand complet avait pris place à la base aérienne d' Evreux ; le 14, le brouillard épais qui régnait sur Paris fit annuler le défilé aérien.

Dans ma tête reste le souvenir de cette annonce incongrue pour un pilote habitué aux grands espaces aéromaritimes: "Leader de deux, Sacré Cœur à midi, niveau", et de Paris au ras des toits...

Goz Beïda, le 30 juin 2002

"Là, tout n’est qu’ordre et beauté, silence, calme et sérénité" (1991)

Il n’était pas encore huit heures en ce matin de novembre 1991 et des nuages bas, épais, mouillés, roulaient sur la base aéronavale de Landivisiau que je commandais depuis près de 18 mois. De la fenêtre de mon bureau, alors que le jour commençait à poindre et la base à s’animer, je vis sortir du grand hangar du S.E.A. (Service Entretien Avions) le long cigare d’un Crouze, celui-là même que je me préparais à conduire à la Flottille 12F qui faisait une campagne de tir canon Air/Air à Solenzara: Solenzara au sud-est de la Corse est une base de l’Armée de l’Air spécialisée dans le tir et construite au bord de la mer. Une occasion pour moi de rendre une visite de courtoisie au Colonel qui la commandait et à une unité que je connaissais bien, tout en faisant œuvre utile: l’apport d’un avion supplémentaire.

Seul dans mon bureau, déjà revêtu de ma tenue de vol et de la combinaison étanche en prévision du survol de la mer, j’étudiais la météo: elle annonçait une France couverte d’une épaisse couche de nimbostratus, des terrains fermés sauf dans le sud-ouest et sur la côte méditerranéenne. Beau temps à Solenzara… C’est à ce moment-là que l’on frappa à ma porte, d’ailleurs ouverte. C’était le chef de brigade de gendarmerie maritime. Il tenait à me voir "pour une affaire importante…" Je lui répondis que j’étais déjà en vol, que le commandant en second ne tarderait pas et qu’il était habilité à traiter "d’affaires importantes". Mais c’était méconnaître la ferme volonté dont un gendarme maritime, breton et chef de brigade, peut faire preuve. Argument majeur: c’est personnel. Pressé de m’en défaire, je lui répondis : "alors rapidement, je vous écoute". Très militaire, il prit sa respiration pour me dire : "La Justice de Rennes va me désigner avec commission rogatoire dans le cadre de l’affaire F…." Sans aucun doute et pour dire le moins, cette perspective ne lui déplaisait pas étant donné l’empressement qu’il mettait à m’en faire part. Lui, le brigadier - chef allait être mandaté pour interroger le capitaine de vaisseau commandant l’aéronautique de Landivisiau. Je restai calme et lui répondis : "Je puis vous certifier que vous ne m’interrogerez jamais. Commission rogatoire ou pas, le jour prévu j’aurai deux mains dans le plâtre – pour m’empêcher d’écrire – et un certificat médical dans la bouche, certifiant que je suis aphone…" Il me connaissait assez pour savoir que je disais vrai et resta muet. J’ajoutai: "maintenant, laissez-moi, je vous l’ai dit, je suis en vol."

Quelques minutes plus tard, vidant de mon esprit tout ce qui n’était pas le vol, j’achevai de m’installer dans le cockpit: prise anti-g, harnais serré et verrouillé, casque mis avec sa jugulaire, oxygène branché, casse-rotules serrés, cordon radio enfoncé, les six sécurités du siège éjectables présentées par le patron d’appareil, comptées et rangées. Un dernier mot aimable à ce dernier avant de boucler le masque à oxygène. La verrière est fermée et verrouillée. Je suis seul. Par signes conventionnels la mise en route puis les multiples vérifications par les mécanos et moi même exécutées, le patron d’appareil par signes des bras levés guide la sortie de l’aire de stationnement. Pataud, le Crouze roule vers l’entrée de la piste 26, face à l’ouest. Le contrôleur de tour me donne le dernier vent, le cap après décollage, la "clearance" de mon plan de vol et avant alignement sur la piste me fait passer sur la fréquence du contrôleur d’approche: procédure terrain jaune.

Plafond 300 pieds ; vent 25 nœuds, rafales à 35 entre le 260 et le 240, légèrement gauche. Plein gaz sur freins, vérification des paramètres moteurs, lâcher des freins puis je casse la manette à gauche : Post-Combustion (P.C) enclenchée, l’avion accélère vite et – travers tour c’est à dire par le travers de mon bureau – décolle pour entrer bientôt dans la couche. Train rentré, voilure basse et contre verrouillée, accélération vers 1000’et 350 nœuds et coupure de la P.C. Ça danse dans les nuages, ça s’agite. Les yeux fixés sur les instruments je me mets en virage par la gauche vers le cap 130. Je suis seul en vol. Je quitte la fréquence de l’approche pour passer sur celle de "Menhir Radar", l’organisme de contrôle aérien militaire équipé de puissants radars qui couvrent l’espace aérien de la Bretagne et de ses approches maritimes. Juste les quelques mots nécessaires tandis que la longue montée au travers de la couche nuageuse se poursuit; puis peu à peu les nuages se font plus clairs, et soudain, en atteignant le niveau de vol 360 c’est à dire près de 11 000 mètres d’altitude, c’est l’éblouissement d’un soleil encore bas, d’un ciel bleu profond au-dessus d’une mer de nuages immaculée à perte de vue. Je réduis alors le régime moteur pour stabiliser la vitesse à 0.87 de mach soit environ 16 kms par minute, celle qui permet d’aller le plus loin avec le carburant dont je dispose. Je suis serein. En effet, n’ai-je pas accédé à un autre monde qui n’appartient qu’aux pilotes de monoplace… ?

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Tandis que j'écris :

" Clââode, yé dou trhâvail poul toâ" chante la voix de Miléna, "c’est oun hom à Modeyna* qui a plousiors balles dans le bras et les oss brrisés, qu’il faut pétêtre lui couper…" C’était à 9h15 ce matin. Depuis midi, l’homme qui a été attaqué par des voleurs de chameaux est hospitalisé. D’après Alexandro, il faudra probablement l’amputer. Les os sont fragmentés. Et ici…on n’a pas les moyens de faire mieux, avant la gangrène.

*110 kms dans Est Nord Est de Goz Beïda.
Six mois plus tard, toujours à Goz Beïda, je reprends le fil de mon récit...
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A l’instar de Sisyphe, que Camus se plaisait à imaginer heureux à l’instant précis où du sommet de la montagne, il tournait son regard vers la mer tandis que la roche qu’il était condamné à remonter dévalait la pente, je suis pleinement heureux et me récite ce vers de Baudelaire recomposé: "Là tout n’est qu’ordre et beauté, silence, calme et sérénité."

Je disais plus haut que ce matin-là, j’étais seul en vol. Il me faut corriger cela. Nous étions deux, la machine et le pilote dans une relation parfaite, non pas celle de l’animal et de son maître (je n’aime pas ce mot) mais plutôt de complémentarité, ce mot que toute ma vie j’ai préféré à celui d’opposition. La machine avait donné sa puissance, son énergie, son oxygène, son aptitude à défier vent, pluie, bourrasques, elle me disait même où nous étions. Je lui disais seulement où aller, comment y aller, au moindre effort, au minimum d’énergie dépensée. Après la course de décollage et la montée dans un monde hostile, nous étions dans un de ces moments privilégiés, moment de bonheur, en confiance réciproque. Là-bas, en dessous, c’était toujours vent, pluie, bourrasques, danger, mais ce n’était pas pour nous. Le moteur ronronnait comme le ferait un tigre au repos. Je l’écoutais comme on peut écouter un instrument de musique ou un chat qui ronronne. "Menhir" me transféra bientôt à "Rambert."

Je jouissais de ce silence, j’étais loin de mon gendarme, loin des tracas de la préfecture maritime. Après vingt minutes ainsi, j’entendis la voix où l’étonnement le disputait à un rien d’inquiétude:
- "Lascar 30 de Rambert, vous êtes toujours là ?
- Affirmatif, Rambert, tout va bien, je suis sur ma route…"
Les contrôleurs se connaissent entre eux, et sûr, ceux de Menhir qui me connaissaient bien avaient dû les prévenir: "ne t’inquiète pas, il n’est pas bavard", mais tout de même…

Après un peu plus d’une heure de vol, ce fut l’arrivée sur la Méditerranée que j’avais pu voir de fort loin, éblouissante sous le soleil. Tout à coup plus de nuages. Mais oui, c’est Toulon tout en bas. Je distingue fort bien un porte-avions amarré à un quai. Autorisation de me mettre en descente ; la mer glisse sous les ailes à la vitesse du son. La côte corse s’inscrit dans la glace frontale : arrivé à proximité de Calvi, je suis à basse altitude, survole les montagnes à les raser, arrive sur la plaine qui s’étend de Bastia à Solenzara, vire par la droite cap au sud. "Solenzara de Lascar 3O, un Crusader en provenance de Landivisiau à destination de votre terrain". 360 nœuds, 1000 pieds, break à gauche, train, voilure, pression vérifiée. Il est 9h30. Le commandant de la 12F est là. Tout sourire. Moi aussi. "Voilà votre avion commandant, RAS. Il tourne comme une horloge. "

Ce jour-là je fis un vol de tir canon air/air sur panneau remorqué. Ma modestie dût-elle en souffrir (si peu…) je dois avouer qu’avec 10% de trous, j’obtins le meilleur score de la patrouille! Je n’avais pas tiré depuis 1976 "mais il y a des choses qu’un chasseur n’oublie pas" comme ne l’aurait pas chanté Barbara.

A propos, je n’ai jamais été interrogé par le brigadier chef de gendarmerie: on envoya un lieutenant colonel (de gendarmerie bien sûr), chef de la brigade des recherches au parquet de Rennes, rien que ça. Après qu’il se fût excusé trois fois de venir me déranger, je répondis sans effort à ses multiples questions. Il s’agissait tout de même de m’inculper d’homicide involontaire… ce qui n’est pas rien.

Goz Beïda, le 29 juin 2002

Après une longue absence (1987)

A 48 ans je venais de prendre les fonctions de chef d’état major d’ALPA, alias l’amiral "Porte-avions" alias commandant"le groupe des porte-avions et l’aviation embarquée".

A cette époque, le Cruze vieillissait mal. Il réservait bien des mauvaises surprises aux pilotes, du genre blocage de commandes de vol, pannes électriques, pannes d’instruments de vol… Le moral n’était pas au beau fixe, la Marine attendait du ministre (J.P.Chevènement, tiens, tiens...) l’autorisation d’arrêter l’avion dont l’entretien en profondeur était déjà suspendu. Il fut jugé bon qu’une autorité et son bras droit reprennent les vols sur cet animal. Ainsi fit Alpa pour l’exemple. Ainsi fis-je… pour le plaisir!

La 12F affectée à la Base Aéronavale de Landivisiau (Finistère Nord) était commandée par le capitaine de frégate B. Autre temps, autres mœurs: j’étais lieutenant de vaisseau dans la même fonction 14 ans plus tôt. Je m’y rendis depuis Toulon. B., que je ne connaissais pas ou peu, devait me connaître par… le cahier de marche de la Flottille et par ce qui se raconte dans les carrés. Il était heureux de me voir, je le compris. A défaut de simulateur de vol, parti en révision générale pour plusieurs mois, il me fit redécouvrir, après 7 ans d’absence, le cockpit de l’avion. Assis sur le siège, mes mains retrouvaient la mémoire tactile de toutes ces commandes, boutons, interrupteurs. Il me suffisait de penser à un ordre, mes mains l’exécutaient toutes seules…

C’est par un bel après-midi d’octobre que je décollai pour une deuxième découverte, en tant qu'équipier de B. (indicatif Lascar bleu leader). Après environ 40 minutes de manœuvres diverses entre 15 000 et 45 000 pieds vint le moment de prendre la formation de poursuite. Est-ce intentionnellement que nous étions à la verticale de la base? Bleu leader partit donc dans le plan oblique d’abord avec la manette des gaz de plus en plus sur l’avant jusqu’à la position "pleins gaz". L’avion allégé était agréable à piloter et je suivais "stable à 50/100m" derrière, décalé pour éviter le souffle. J’entendis alors "Bleu 2, attention… P.C… top !" et je vis la post-combustion du leader s’allumer. La mienne en fit autant et nous partîmes pour 5 minutes de bonheur dans les azurs, à cadence max (6 à 7G). De mon temps ce genre de poursuite était prohibé. Les générations nouvelles avaient fait avancer le "schmillblick" et c’était très bien ainsi.

Le spectacle devait être agréable pour le personnel de la base: un "ancien" dans le sillage d’un "pacha" lancés dans un vol "sportif", cela ne pouvait qu'être bon pour leur moral… car c’était aussi un acte de confiance que ce vol.

Goz Beïda, le 28 juin 2002.

Sept vies dans un avion de quatre places au-dessus du désert du Ténéré (Août 2007)

Cette anecdote se déroule au Niger, au cours de l'une de mes missions au profit d'Aviation Sans Frontières.

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Il était 14 heures ce 28 juillet 2007 quand le téléphone sonna. Une voix difficilement compréhensible répondit à mon "Pilote aviation sans frontières, je vous écoute". Je finis par saisir qu’à plus de trois heures de vol de Zinder, à l’autre bout du désert du Ténéré, une femme en mal d’accoucher devait être évacuée. C’était le maire de la bourgade – Bilma, une oasis au pied d’un plateau rocheux – qui m’appelait.

La région de Zinder
(cliquez sur l'image pour agrandir)

Le terrain le plus proche se situait à Dirkou, à 40 km au nord-oust de Bilma – j’avais une carte sous les yeux – et je lui demandai si cette femme était transportable par voiture. Je lui précisai aussi que pour que l’évacuation puisse se faire, j’avais besoin de l’avis d’un médecin. De plus l’heure était trop tardive et il me faudrait attendre le lendemain matin pour venir. Une heure plus tard je recevais l’appel du médecin-capitaine de Dirkou me confirmant la demande pour une évacuation sur Agadès où se trouvait un hôpital. Je lui annonçai donc mon arrivée pour onze heures le lendemain, puisque je ne pouvais pas décoller avant 7 heures de Zinder, pour des raisons d’horaire d’ouverture de l’aérodrome et de lever du soleil aussi.

Dirkou se situe à 40km de Bilma
(nord-est du Niger)
(source photo: ici)

Je partis préparer l’avion, c’est-à-dire en compléter les pleins et remplir d’essence cinq bidons de 20 litres qui me permettraient d’effectuer le vol jusqu’à Agades en préservant la petite réserve de 100 litres en place à Dirkou. Il était 7 heures tapantes quand je décollai de Zinder le lendemain matin. Pour bénéficier d’un vent portant jusqu’à la moitié du parcours, je choisis l’option d’un vol à basse altitude. Vingt minutes après le décollage je perdais le contact VHF avec la tour de Zinder et pris le contact en HF et longue portée avec Niamey. Sous les ailes, après une heure de vol, il n’y avait plus trace de verdure. Sable et cailloux et bientôt les dunes, c’étaient là les éléments qui composaient le paysage. Par moments je volais dans un air saturé de sable, l’horizon disparaissait et j’avais du mal à distinguer le sol. Je passais alors au vol aux instruments, c’est-à-dire sans plus regarder dehors ; j’avais confiance en ce petit horizon artificiel particulièrement fiable qui m’avait déjà bien souvent aidé à me tirer d’affaire alors que je n’étais censé voler que par beau temps…

Après une heure de vol je perdis tout contact radio. L’impression de solitude, totale, ne m’était pas désagréable. Bien que me demandant qui et au bout de combien de temps serait à même de venir me chercher en cas d’atterrissage forcé, je n’avais aucun sentiment d’angoisse. Seul au dessus du désert de sable et dans un ciel vide, le cap sur un terrain inconnu au milieu des contrées les plus désertiques au monde, aux commandes d’un petit monomoteur pour aller chercher une femme tout aussi inconnue dont la survie tenait à si peu... j’étais serein. Je me sentais tout à la fois hors du monde et pourtant dans le monde car agissant de façon désintéressée en ayant pour motivation la solidarité avec les plus démunis. Cela me convenait tout à fait.

Une gorgée d’eau, un peu de sucre et une bouchée de pain de temps à autre pour rester vigilant ; le corps est une usine chimique et le cerveau son micro-ordinateur de commande: le pilote de monoplace n’a pas droit au "bug" et c’est pour cela qu’il doit être attentif à la déshydratation et à la chute du taux de glycémie. Élémentaire, n’est-il pas? L’attention toujours en éveil: cap, horizon, altitude, horizon, vitesse, horizon…

Quand le sable s'envole, il reste le vol aux instruments...

Et puis un coup d’œil à la carte pour chercher le prochain point remarquable au milieu de nulle part que l’on peut espérer découvrir si la visibilité s’améliore. Pour cette fois, ce sera une série de quatre pitons qui devraient apparaître au bout de trois heures de vol sur la gauche, alignés selon une oblique. Dans cette attente, un coup d’œil à l’extérieur me permit d’apercevoir le sommet d’un palmier dépassant d’une dune, tout ce qu’il restait sans doute d’un bouquet d’arbres autour d’un puits recouvert par le sable toujours en mouvement.

Ce jour-là, la chance était de mon côté: dans le coin gauche du pare-brise, apparaît en effet le premier piton – souvenir lointain d’une ancienne activité volcanique – bientôt suivi par trois autres, parfaitement alignés. Dans trois quarts d’heure je devrais être à même de découvrir la piste et plus loin derrière, les falaises qui dominent Dirkou.

Les 4 "pitons" espérés

La visibilité n’était pas excellente, loin s’en fallait ; l’heure tournait, le soleil montait, le désert chauffait et le sable avait tendance à s’envoler. Mais trois ou quatre kilomètres de visi, c’est plus que suffisant et c’est sans soucis que je suivais les indications du GPS, il suffisait de savoir attendre: un coup d’œil à l’instrument, un autre dehors dans l’axe, loin devant et bientôt la bonne nouvelle arrive ; la piste est là, axée par coïncidence sur la route suivie. Elle est longue, et je peux sans me poser de question atterrir directement avec du vent arrière ; c’est toujours un peu du précieux carburant économisé.

La piste!

La piste était au milieu du sable mais je n’avais pas aperçu de bourgade non plus que les falaises qui la dominent ni la vaste oasis dont on m’avait parlé. C’est au cours d’une autre mission qu’il me serait donné de les découvrir avec le secret révélé de la présence d’une nappe d’eau fossile – il ne pleut jamais à Dirkou - sous quelques mètres de sable.

Dirkou vu du ciel

Dirkou

Deux militaires armés de Kalashnikov m’accueillirent aimablement à l’aire de stationnement. Sans plus attendre je déchargeai les bidons de carburant que les soldats me firent passer tandis qu’assis sur l’aile je procédais au complément du plein. Bientôt deux véhicules soulevant un nuage de poussière approchèrent d’où débarquèrent l’adjoint au maire, deux conseillers et des parents de la jeune femme à évacuer, suivis d’une troisième avec le médecin, la femme en question, allongée à l’arrière, et une autre très jeune mère avec un bébé dans les bras.

Deux militaires gardent l'avion

Le plein achevé, l’adjoint au maire me remit la somme de 80 000 CFA, montant de la participation symbolique des habitants, qu’il convient de comparer aux huit heures de vols dépensée par ASF et financées par le conseil général de la Loire atlantique et quelques industriels de l’ouest de la France.

Les accompagnants

Le médecin me prit à part pour m’expliquer que faute d’instruments adéquats en état de marche il ne pouvait dire si la parturiente attendait des triplés, des jumeaux ou faisait une grossesse nerveuse avec rétention d’eau! Puis il me demanda s’il était possible de prendre en plus la jeune mère d’un bébé de neuf mois ayant absorbé du gazole. Ce dernier endurait des difficultés respiratoires auxquelles le médecin ne pouvait plus rien, la réserve d’oxygène de l’hôpital étant épuisée.

Une mère et son enfant.

Je répondis par l’affirmative : l’on installa la parturiente et sa mère à l’arrière, la jeune mère devant en place droite avec son enfant dans les bras et les bagages dans la « coffre ». Attentif à la santé du cocher, le médecin m’avait apporté des biscuits, du chocolat et une boisson tonique fraîche, un trésor sans le moindre doute pour lui qu’il me donnait généreusement. Il était midi, le soleil était à la verticale, le Ténéré ressemblait à un immense plat chaud recouvert de sable. Le vent et la température – 40 degrés – militaient en faveur d’un vol en altitude, l’état de la future mère aussi, en parfaite contradiction avec l’état du bébé qui nécessitait un air aussi riche en oxygène que possible.

La future mère était si enflée que je ne pus boucler la ceinture de sécurité, trop courte de 20 bons centimètres… C’est donc dans cet équipage que j’allai m’aligner face au vent et dos à la ville, par plus de 40 degrés pour un vol de près de trois heures à basse altitude dans un air surchauffé et terriblement turbulent. Comme me l’avait dit le médecin, "c’était ça ou deux jours d’une piste incertaine" car avec les grosses pluies tombées sur l’Aïr (voir la future anecdote "vendredi 13"), celle-ci étaient coupée en plusieurs endroits avant d’arriver à Agadès au lieu où elle contourne le massif par le sud.

Au bout d’une heure de vol au dessus du désert, la jeune femme commença à gémir à chaque forte turbulence, c’est à dire très souvent! Je tenais fermement l’appareil, pieds et mains comme on dit, à la fois ferme et souple aux commandes pour amortir les secousses autant que faire se pouvait. Je n’avais qu’une crainte, que la mère se mît à accoucher … Quant au bébé, il dormait dans les bras de sa mère, de ce côté tout allait bien.

Bientôt se profila la silhouette et les premiers contreforts du massif de l’Aïr sur l’avant droit du pare-brise en même temps que s’établissait le contact radio avec la tour d’Agadès. Rien que de bonnes nouvelles, les conditions sur le terrains étaient bonnes. Des véhicules militaires et des soldats armés en grand nombre occupaient les installations; les choses avaient bien changé depuis mon dernier passage; sur l’aire de stationnement, une ambulance militaire attendait ; cinq minutes après l’arrêt du moteur, elle emportait vers l’hôpital les trois femmes et le bébé…. Et (je l’appris plus tard) les jumeaux qui avaient eu le bon goût d’attendre d’être en lieu sûr pour débarquer dans ce monde hostile mais parfois solidaire.

Je profitai de me trouver sur un terrain avec quelques réserves d’essence pour faire le plein de l’avion et des "jerrycans" en plastic. A Zinder comme dans les auberges espagnoles, on ne consomme que l’essence que l’on a apportée. Le commandant de l’aérodrome vint me saluer, toujours aimable, simple, souriant et prêt à apporter son aide. On commençait à bien se connaître.

Après deux heures d’un vol tranquille, je me posais à Zinder et rendis compte à ASF ORLY de cette double évacuation. La réponse de mon cher Président ne se fit pas attendre: le prix pour cette évacuation était trop élevé ! Je lui répondis que le coût devait être divisé par deux bien sûr – le bébé et la parturiente – puis quelques jours après, en apprenant que bébé, mère et jumeaux avaient tous pu être tirés d’affaire grâce à ce vol, je précisais que c’était en définitive par quatre qu’il fallait diviser le prix à payer pour l’opération, soit deux heures de vol pour une vie.


Finistère, le 12 octobre 2008